La situation d’Haïti se dégrade rapidement, exacerbée par le gel de l’aide américaine, notamment pour le programme PEPFAR, et la déportation imminente de milliers de migrants haïtiens vers le pays. Dans une interview accordée à l’Agence de Presse (AP) ce samedi, le président du Conseil présidentiel de transition, l’architecte Leslie Voltaire, a reconnu que ces événements pourraient avoir des conséquences « catastrophiques » pour le pays, déjà frappé par une crise humanitaire et économique profonde.
En parallèle, Haïti fait face à une crise alimentaire majeure, avec près de la moitié de sa population de 11,4 millions de personnes en situation d’insécurité alimentaire. Dans ce contexte, la question de la pertinence des dépenses publiques pour des événements comme le carnaval national suscite de plus en plus de débats. Alors que la nation est en proie à une violence galopante, avec des gangs armés qui contrôlent une grande partie du territoire, certains estiment qu’organiser le carnaval pourrait être perçu comme une priorité discutable.
« La sécurité de la population et la lutte contre les gangs doivent être la priorité », a déclaré un analyste politique sous couvert d’anonymat. Il fait référence aux appels répétés de la Police nationale haïtienne pour un soutien accru en matériel et en ressources humaines afin de lutter efficacement contre la criminalité, qui paralyse le pays depuis plusieurs mois.
Dans un autre registre, la préparation de la visite du président colombien Gustavo Petro à Jacmel soulève également des interrogations. Le gouvernement haïtien a débloqué une somme de 3,8 millions de dollars pour cet événement, un montant qui pourrait sembler disproportionné au regard de la crise actuelle. Certains observateurs se demandent quelles retombées concrètes cette visite pourrait réellement apporter, alors que le pays traverse une période de transition politique, sans gouvernement stable ni véritable légitimité internationale.
« Est-ce une priorité stratégique pour Haïti d’accueillir un président étranger dans ces conditions ? », s’interroge un membre de la société civile. « La visite de Petro pourrait avoir une importance symbolique, mais elle ne résoudra pas les défis immédiats auxquels le pays est confronté. »
Alors qu’Haïti cherche désespérément une sortie de crise, la question des priorités gouvernementales devient de plus en plus cruciale. Entre la gestion des urgences humanitaires, la lutte contre l’insécurité alimentaire et la mise en place d’une véritable politique de sécurité, beaucoup se demandent si la préparation d’un carnaval national ou l’accueil d’un président étranger sont des décisions sensées, voire opportunes, dans ce contexte de crise multidimensionnelle.