Depuis plusieurs années, Haïti est plongée dans une crise pluridimensionnelle. Toutes les institutions clés du pays ont failli à leurs missions et aucune conscience n’est manifestée parmi les acteurs politiques pour tenter de redresser la situation. Qui plus est, les écoles et les universités privées ou publiques dans la zone métropolitaine de Port-au-Prince, qui fonctionnaient au ralenti à un certain moment, sont totalement fermées depuis plusieurs semaines en raison de l’escalade de la violence des gangs armés.
En effet, le calvaire du peuple haïtien ne date pas d’hier. Bien avant l’assassinat du président Jovenel Moïse en juillet 2021, le pays était déjà confronté à de grandes difficultés, notamment une insécurité grandissante, le coût de la vie élevé, le chômage, entre autres, suscitant la colère des membres de la population qui ont organisé d’importants mouvements de protestation contre le pouvoir, d’où le phénomène de « pays lock ».
Ces rassemblements, souvent suivis d’intenses tumultes, paralysaient les activités commerciales et scolaires pendant des semaines, constituant l’une des causes de perturbation du gouvernement de Jovenel Moïse, qui malheureusement ne pouvait pas organiser les élections dans le pays. De plus, l’opposition politique a appelé la population à descendre dans la rue pour exiger la démission du président Jovenel Moïse en raison de l’insécurité, du chômage, de la mauvaise gouvernance, entre autres.
Les opposants farouches de « Nèg bannann nan », dont ’t André Michel, Nenel Cassy avaient appelé les jeunes de chaque zone à rester chez eux et à se tenir derrière leurs barricades. Car, disent-ils, ces « barricades sont leur avenir”.
En juillet 2021, le président Jovenel Moïse a été assassiné chez lui dans la nuit du 6 au 7 juillet, alors qu’il était censé être sécurisé par des gardes présidentiels. Il a été tué par un commando composé d’anciens militaires étrangers et d’Haïtiens, créant ainsi un vide constitutionnel. Nommé Premier ministre par Moïse avant son assassinat, le neurochirurgien Ariel Henry a accédé au pouvoir dans un contexte de crise aiguë.
La situation a commencé à se détériorer à la suite de ce crime odieux, avec la prolifération des gangs armés dans la zone métropolitaine de Port-au-Prince et certaines villes de province, dont le Bas Artibonite. Les bandits kidnappent, pillent, brûlent et violent les femmes, et contrôlent aujourd’hui presque toute la capitale, sous le regard aveuglé d’Ariel Henry.
Port-au-Prince assiégé
Il y a plusieurs semaines, une coalition de gangs armés portant le nom de « Viv ansanm » a mis Port-au-Prince à genoux. Ces criminels non seulement accaparent des zones, mais attaquent également et incendient des institutions publiques et privées du pays. Ils ont pris d’assaut les deux grands centres carcéraux du pays, à savoir le Pénitencier National et la Prison civile de la Croix-des-Bouquets, permettant à plus de 5000 détenus de prendre la fuite.
Les criminels ont également attaqué puis incendié plusieurs commissariats et sous-commissariats de l’aire métropolitaine de Port-au-Prince, menaçant de progresser vers d’autres cibles. Leur demande incluait la démission d’Ariel Henry en tant que Premier ministre, bloqué à l’étranger depuis environ deux semaines.
Une situation qui est dépassée par les événements. Les activités scolaires sont au point mort, les portes des universités restent fermées. Des banques commerciales sont fermées ou fonctionnent au ralenti. Avant même cette escalade de la violence, plusieurs établissements scolaires avaient été vidés en raison de la recrudescence de l’insécurité. Le pire, les onze entités de l’Université d’État d’Haïti (UEH) se trouvent à Port-au-Prince, presque au même endroit, de même que des universités privées.
À quand un retour à la normale pour que les activités scolaires et universitaires reprennent convenablement ? En tout cas, Ariel Henry a annoncé lundi sa démission en tant que chef de la Primature pour permettre la mise en place d’un Conseil présidentiel de transition, permettant ainsi au pays de respirer une bouffée d’air de soulagement face à une crise qui l’asphyxie depuis plusieurs années.