Alors que la situation socio-économique d’Haïti continue de se détériorer et que des mouvements de grève, comme celui des professeurs réclamant une augmentation de salaire, se multiplient, le comité du carnaval national 2025 a annoncé un budget de 536 millions de gourdes, soit plus de 4 millions de dollars américains, pour l’organisation de l’événement. Ce dernier se déroulera à Fort-Liberté, du 2 au 4 mars 2025, sous le thème : « Haïti debout ! Ayiti Kanpe ! », un message de résilience et d’espoir face à l’adversité.
Les autorités ont déjà pris les mesures nécessaires pour débloquer cette somme, selon nos informations. Toutefois, cette décision suscite de vives interrogations dans un contexte de crise économique et sociale, où l’inflation galopante, l’insécurité croissante et les revendications des différents secteurs sociaux placent l’État dans une position délicate.
Le budget du carnaval, une somme colossale pour le pays, intervient à un moment où des milliers de citoyens, en particulier les enseignants, expriment leur frustration face à la faiblesse des salaires qui peinent à suivre l’augmentation du coût de la vie. Le refus de l’État d’augmenter les salaires dans un tel contexte a provoqué une série de grèves, paralysant une grande partie du secteur public.
Malgré ces tensions sociales, le gouvernement semble vouloir maintenir l’organisation de l’événement phare de la culture haïtienne. Le carnaval, qui attire chaque année des milliers de spectateurs locaux et internationaux, est perçu par certains comme un vecteur important de la culture et du tourisme, essentiel pour l’image d’Haïti à l’échelle internationale. Le thème choisi, “Haïti debout ! Ayiti Kanpe !”, est un appel à la résistance face aux difficultés et un symbole de l’espoir de voir le pays se redresser.
Cependant, de nombreuses voix s’élèvent pour souligner l’incohérence de cette décision au regard des priorités immédiates du pays. Si la célébration de la culture nationale et la mise en avant de la résilience du peuple haïtien sont indéniablement importantes, certains estiment qu’il serait plus pertinent de réaffecter une partie de ces fonds à des mesures urgentes pour soulager les conditions de vie des Haïtiens. Les critiques pointent notamment l’incapacité de l’État à répondre adéquatement aux besoins de la population, notamment dans les secteurs de l’éducation, de la santé et de la sécurité.
Le carnaval national, bien qu’un événement rassembleur, pourrait être perçu comme un symbole de déconnexion entre le gouvernement et les réalités du peuple haïtien. Dans ce contexte de crise, les attentes des Haïtiens ne sont plus seulement d’ordre festif, mais aussi de nature urgente : une amélioration des services publics, des conditions de travail décentes et des solutions concrètes face à l’inflation galopante.
Le 2 mars, lors de l’ouverture du carnaval à Fort-Liberté, les rues seront animées par des défilés colorés, des costumes traditionnels et des musiques entraînantes, symboles de la vivacité culturelle haïtienne. Mais il sera difficile de faire abstraction des préoccupations sociales qui pèsent sur l’ensemble de la population. Ce carnaval, dans sa grandeur et son éclat, pourrait bien être le miroir d’une nation en quête de réconciliation entre sa riche culture et les défis économiques qui l’assaillent.