En Haïti, les violences sexuelles constituent un fléau qui touche chaque année des milliers de femmes, de jeunes filles et même de mineurs. Ces actes ignobles, perpétrés entre autres par des tuteurs, des directeurs d’école, des employeurs, ou encore par des groupes armés, laissent des victimes souvent livrées à elles-mêmes, sans accompagnement adapté ni justice. Cette réalité, bien que dramatique, demeure trop souvent occultée.
En 2024, l’organisation non gouvernementale Médecins Sans Frontières (MSF) a rapporté avoir assisté 4 463 survivants de violences sexuelles et sexistes. Ces interventions se sont principalement déroulées dans leurs cliniques « Pran Men’m » situées à Delmas 33, à la maternité de Carrefour, et à l’hôpital de Cité Soleil. MSF étend également son aide à travers des cliniques mobiles dans divers quartiers de Port-au-Prince. Selon des informations rendues publiques par les responsables de l’ONG. Ces chiffres illustrent une partie du problème, mais de nombreux cas restent non signalés, laissant planer un doute sur l’ampleur réelle de ce fléau.
Dans les villes de province, la situation est tout aussi critique. Les structures d’accueil et d’assistance y sont encore plus rares, renforçant le sentiment d’isolement des victimes. Nombre d’entre elles n’osent pas parler des violences subies par peur de stigmatisation ou par manque de confiance envers le système judiciaire. On se rappelle en 2024, le cas de viol perpétré par Réné Toussaint, directeur de l’Institution Mixte de Formation et de Recherche située à Delmas 60. Ce dernier a violé et mis enceinte une élève de son établissement, mais aujourd’hui les parents de la jeune victime crient au scandale, face à une justice complaisante envers le bourreau.
Les victimes de viol en Haïti affrontent une double peine. Au traumatisme psychologique et physique s’ajoute la stigmatisation sociale. Les préjugés et les tabous entourant les violences sexuelles poussent de nombreuses femmes et jeunes filles à garder le silence. Certaines craignent d’être rejetées par leur famille ou leur communauté, tandis que d’autres redoutent les représailles de leurs agresseurs.
Selon des rapports publiés par des organisations locales et internationales, près de 80 % des cas de violences sexuelles en Haïti ne font jamais l’objet d’une plainte officielle. Ce taux élevé d’impunité alimente un cercle vicieux où les agresseurs continuent leurs actes sans craindre de conséquences.
Les institutions d’encadrement aux victimes plaident unanimement en faveur d’un accompagnement médical, psychologique et juridique pour aider les personnes violées à reconstruire leur vie. Cependant, ces services sont souvent absents ou sous-financés. N’en parlons même pas des zones rurales, où les besoins sont également immenses.
En attendant, les efforts des organisations de femmes, des ONG et des centres de prise en charge et d’accompagnement restent une bouée de sauvetage pour des milliers de victimes. Mais il est clair que la lutte contre les violences sexuelles en Haïti n’est pas uniquement une question humanitaire : elle nécessite une mobilisation collective et des mesures structurelles pour mettre fin à cette épidémie silencieuse.